Depuis le Putsch du 26 juillet dernier, le Niger est désormais dans le collimateur des fabriques de fake news. Ce sont pratiquement les mêmes campagnes de désinformation et de propagande qui ont cours au Burkina Faso et au Mali qui sont désormais servies à l’opinion nigérienne et ouest-africaine : anti-impérialistes, particulièrement anti-françaises et pro-russes. Le panafricanisme et la souveraineté nationale semblent désormais devenus des slogans favoris de ralliement des masses populaires pour les régimes putschistes en Afrique de l’Ouest. Ces slogans font échos à un sentiment de plus en plus partagé au sein de la jeunesse africaine, mobilisent et drainent des foules désormais source de légitimité des pouvoirs Kaki.
Des messages mensongers sur divers supports (des vidéos, des audios, des visuels etc.), montés de toutes pièces et à dessein, inondent les réseaux sociaux sur la situation au Niger. Chaque jour, de nouveaux éléments viennent renforcer les narratifs justifiant la prise du pouvoir par les armes du Général Abdouramane Tchiani, patron de la garde présidentielle, à qui se sont ralliés par la suite d’autres officiers et le haut-commandement de l’armée nigérienne.
Ce qui est constant, dans presque tous ces produits de la désinformation, c’est l’omniprésence de la France et presque responsable exclusif de la crise sécuritaire et le sous-développement du Niger. S’elle n’est pas derrière les groupes terroristes, c’est elle qui pille l’uranium et autres ressources naturelles du Niger ; ou encore, le Président Mohamed Bazoum n’est que son sous-préfet. Tous ceux qui s’opposent au putsch sont considérés, au Burkina et au Mali, comme des valets locaux de l’impérialisme.
De même, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) et l’Union Africaine (UA), ne sont que des regroupements de valets locaux de l’impérialisme, des caisses de résonnance de la France. Elles ne seraient qu’aux ordres de la France. Leurs décisions sont donc présentées comme l’expression de la volonté de la France et de l’Occident.
Bref, un mois après, les putschistes s’affichent en révolutionnaires, désormais décidés à restaurer la souveraineté du Niger et de lui redonner tous les droits sur ses ressources naturelles et sa gouvernance. Ils veulent une transition d’au maximum trois ans pour remettre le Niger sur les rails de la souveraineté et de la démocratie. Une proposition rejetée par la CEDEAO qui, au terme des sommets des chefs d’Etat du 30 juillet et du 10 août, avait décidé de tout mettre en œuvre pour faire échec au coup d’Etat et restaurer l’ordre constitutionnel. Elle a ainsi décidé dans l’immédiat d’une batterie de sanctions allant de la fermeture des frontières au gels des avoirs du Niger en passant par l’interdiction de toutes les transactions financières avec ce pays et des sanctions ciblées sur les auteurs du putsch. Elle a également décidé de la mobilisation de sa force en attente en vue d’un éventuel usage de la force en cas d’échec des négociations.

Pour les propagandistes de la souveraineté et du panafricanisme, cette décision a été brandie comme une déclaration de guerre contre le Niger et son peuple. Pourtant, la CEDEAO est bien dans son rôle et agit conformément au protocole additionnel de la charte pour la bonne gouvernance et la démocratie. Mieux, elle n’a certainement pas besoin de la France pour comprendre la menace que représente ce putsch pour la stabilité des institutions républicaines dans les pays de l’Espace.
Mais, comme il faut paraitre révolutionnaires, panafricanistes et souverainistes et surtout anti-français pour susciter l’adhésion des masses, les putschistes de Niamey et leurs soutiens n’ont pas cherché loin. Ils ont juste copié ce qui semble marcher au Burkina Faso et au Mali, les principaux et rares soutiens affichés du putsch au Niger.
Les officines de la désinformation et de la manipulation sont donc entrées massivement en renforts pour donner cette image de révolutionnaire au général Tchiani et à ses compagnons.
Mais, ces propagandes cachent difficilement le fait que ce putsch est tout sauf révolutionnaire. Plus les jours passent, plus le voile se lèvent progressivement sur les véritables raisons du putsch. Ce putsch que d’aucuns ont qualifié de « coup d’Etat pour convenance personnelle » finira par dévoiler ses dessous réactionnaires, avec le temps.
Malheureusement, cette posture du Conseil national pour la sauvegarde de la patrie (CNSP), l’organe politique des putschistes, éloigne progressivement le Niger d’une issue diplomatique et pacifique de la crise. En effet, autant la CEDEAO que les putschistes, les parties sont allées assez loin pour faire marche-arrière. Il ne reste plus à espérer que les acteurs sauront revenir à la raison au nom de l’intérêt supérieur du Niger déjà mal en point avec l’insécurité et aujourd’hui l’instabilité politique et les effets draconiens des sanctions de la CEDEAO.
Nerwatta Kafando